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Sarcopénie : Des avancées dans la compréhension de la relation entre le diabète de type 2 et le muscle

Docteur Karim Bouzakri, Directeur de laboratoire au Centre européen d’étude du Diabète, Strasbourg et Claire Masalski

Été 2019 - lettre n°30
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Le diabète de type 2, une maladie associée à de nombreuses complications

Le diabète de type 2 résulte d’une baisse de sensibilité des organes cibles à l’insuline (notamment le foie, le muscle et le tissu adipeux (gras)), associée à une perte de sécrétion de l’insuline par les îlots pancréatiques. Ainsi, le sucre s’accumule dans le sang (hyperglycémie) et devient toxique pour l’organisme.

Cette forme de diabète étant généralement asymptomatique, la maladie peut être diagnostiquée plusieurs années après son apparition, une fois les complications malheureusement déjà présentes. C’est pour cela qu’il est important de se faire dépister régulièrement (tous les 2 ans) et plus particulièrement si la personne est en surpoids et/ou a des antécédents de diabète dans sa famille.

Sont le plus souvent en cause : les facteurs génétiques, héréditaires et le mode de vie (sédentarité, alimentation, consommation de tabac, hypertension artérielle…). Le traitement repose alors prioritairement sur des mesures hygiéno-diététiques (alimentation équilibrée et pratique d’une activité physique régulière). A cela peut également s’ajouter un traitement antidiabétique par voie orale, pouvant aboutir par la suite à un traitement à l’insuline.

Les complications du diabète de type 2 touchent l’ensemble des organes clés de l’organisme avec une forte prévalence des risques cardio-vasculaires, la cécité, la néphropathie, l’insuffisance rénale, ou encore les cancers… Peuvent également apparaître d’autres complications moins connues, comme la déficience intellectuelle, les fractures osseuses et les troubles locomoteurs, qui concernent l’ensemble des organes permettant de se déplacer : os, articulations des membres et de la colonne vertébrale, ligaments, tendons et muscles dans le cas de la sarcopénie.

La sarcopénie : une complication importante du diabète de type 2

La sarcopénie se caractérise par une diminution de la masse musculaire, de la force musculaire et des performances physiques qui apparaissent naturellement avec l’âge.

Il est avéré que le diabète de type 2 en accélère l’apparition. Un constat corroboré par des résultats issus d’études épidémiologiques.

Au contraire des complications micro et macro vasculaires, la prévention et le traitement de cette complication plus méconnue ne constituent pourtant pas un objectif majeur dans le soin du diabète de type 2. Ceci s’explique par le manque de connaissances qui persiste encore sur la maladie. Malgré les progrès constants de la recherche médicale, le mécanisme sous-jacent responsable de cette relation entre le DT2 et le déclin des muscles n’est pas encore élucidé. Étant donné que l’insuline est un potentiel stimulateur de croissance et de synthèse de protéine pour de nombreuses cellules, son action insuffisante dans le cas de ce diabète contribuerait probablement à ce déclin.

Une piste de guérison ?

Cette explication a servi de piste pour une récente étude* réalisée sur des souris, qui décrypte l’axe précis en cause dans l’atrophie musculaire. L’équipe du Pr Ogawa de l’Université de Kobé (Japon) a permis une première compréhension des mécanismes qui interviennent au niveau musculaire chez le patient diabétique pouvant expliquer l’apparition de la sarcopénie. En effet, ces chercheurs japonais ont montré chez les souris que l’hyperglycémie sanguine induit une augmentation de la protéine musculaire spécifique appelée KLF15 (Krüppel-like factor 15) et une diminution d’une autre protéine musculaire, celle-ci appelée WWP1.

Habituellement, WWP1 se lie à KLF15 et entraîne sa dégradation. Or, chez les souris diabétiques de type 2, le déséquilibre de concentration de ces protéines dans le muscle entraîne une atrophie musculaire : WWP1, présente en moins grande quantité, ne peut plus entraîner la dégradation de KLF15, qui est alors présente en trop grande concentration dans le muscle. Cette étude démontre donc que la protéine KLF15 est un facteur de transcription, c’est-à-dire qu’elle permet la régulation de gènes spécifiques dans le muscle en charge de dégrader les protéines.

Il faudrait ainsi continuer à se pencher sur cette protéine KLF15 mais aussi sur les gènes régulés par celles-ci afin d’élucider ces mécanismes de la sarcopénie et faire un pas de plus vers le traitement qui permettrait d’en ralentir l’installation chez les patients diabétiques.

 

*Source : Hyperglycemia induces skeletal muscle atrophy via a WWP1/KLF15 axis. Y. Hirata, K. Nomura, Y. Senga, Y. Okada, K. Kobayashi, S. Okamoto, Y. Minokoshi, M. Imamura, S. Takeda, T. Hosooka, and W. Ogawa. February 2019.

 


Pour les équipes de recherche du Centre européen d’étude du Diabète, le muscle est une source de nouveaux espoirs thérapeutiques

  • Le muscle étant un organe au cœur du développement du diabète, cela en fait une cible thérapeutique intéressante et pouvant être à l’origine de potentiels traitements. Dans cette optique, le laboratoire du Centre européen d’étude du Diabète, présidé par le Pr Michel Pinget, dédie une grande partie de ses travaux à cette piste prometteuse.
  • Les équipes de recherche du Dr Karim Bouzakri s’intéressent de très près au muscle et plus particulièrement à l’étude des mécanismes qui pourraient expliquer pourquoi le sport est bénéfique aux personnes diabétiques. L’équipe a pu notamment montrer que chaque muscle sécrète un sécrétome (ensemble de différentes myokines) et que dans le cas de certains types de muscles (ceux utilisés en endurance versus ceux utilisés en résistance), les protéines dites myokines, qui y sont présentes en grande concentration, ont un effet direct et bénéfique sur le pancréas et son fonctionnement.
  • Plus complexe encore, il s’agit de savoir associer les types de sport les plus adaptés aux profils de patients : doit-on prescrire un sport d’endurance comme la course à pied à un patient atteint d’obésité ? Ou bien doit-on prescrire un sport de résistance tel que l’haltérophilie à un patient diabétique ? Maladie chronique exprimée par un taux de sucre dans le sang trop important (hyperglycémie), le diabète est diminué en réponse à l’exercice ; car le muscle est une pompe qui va capter le sucre dans le sang pour assurer son bon fonctionnement. Cela dit, les mécanismes impliqués sont beaucoup plus complexes qu’ils n’y paraissent.

Pour plus d’informations : www.ceed-diabete.org

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