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Big Data et santé : quelle médecine pour demain ?

Hiver 2017 - Lettre n°21
#Big data #objects connectes #internet #Diabète

Le « big data », littéralement « grosses données » ou mégadonnées, est au centre de nombreux débats de santé, car son utilisation, même si elle ouvre de nombreuses perspectives, soulève un grand nombre de questions d’ordre éthique, qu’il s’agira de résoudre à l’échelle de notre société. car ces big data, nous concernent tous de près comme de loin, que l’on en soit conscient ou non… on fait le point !

Les progrès technologiques ont fait exploser les sources de données (via les objets connectés par exemple) tout en consolidant d’autre part nombre d’outils capables de les recueillir et de les analyser. Une aubaine pour les équipes de recherche qui disposent à présent d’énormes sources de données, sans cesse renouvelées, et qui viennent ainsi alimenter leur socle de connaissances. Résultat ? Un réel gain de temps, plus d’innovation et de progrès médical.

Big data : quelles sources ?

De nombreuses données sont collectées au sein de bases médico-administratives, créées à partir de bases telles que celles de l’Assurance Maladie (enregistrement des remboursements effectués), des caisses de retraites ou de centres de recherche  comme l’INSERM.

Ces bases peuvent également être renforcées par des données collectées dans le cadre :

  • de cohortes épidémiologiques*, telles que NutriNet-Santé, une étude, actuellement en cours, dont l’objectif est d’étudier les relations nutritionsanté ;
  • d’études cliniques, analysant les profils de risques et états de santé de populations particulières de patients.

 

Enfin, d’autres données peuvent être recueillies d’une manière moins transparente via les objets de santé connectés, (qui par ailleurs sont souvent reliés à nos smartphones) comme les appareils de mesures de la glycémie, de la fréquence cardiaque, de la pression artérielle, du nombre de pas (…). Une immense source de données le plus souvent stockées et gérées par les géants du Web comme Google, Apple ou Facebook.

Big data : quelles utilités, quels bénéfices ?

Organismes de recherche, issus du secteur public ou privé, entreprises, industriels, associations, sociétés savantes… le big data intéresse tous les acteurs de la santé car il peut être la source d’importants progrès médicaux.

Le recoupement de toutes ces informations à grande échelle et récoltées sur du long terme permet, en effet :

  • d’identifier des facteurs de risque de développement de certaines maladies comme les cancers ou le diabète et de mettre en place des outils de prévention cohérents et par conséquent plus efficaces ;
  • de développer des systèmes d’aide au diagnostic et des outils permettant la personnalisation des traitements ;
  • de vérifier l’efficacité de certains traitements, et d’effectuer une veille sanitaire, afin notamment d’identifier d’éventuelles complications récurrentes (amélioration de la pharmacovigilance) ; de prédire la survenue d’épidémies.

Le big data est donc une aide précieuse à la conduite des politiques de santé, pour l’optimisation du système de soins.

Big data : quelles limites ?

L’accès à ces données, puis leur partage, nécessite néanmoins la mise en place de mesures de sécurité préalables visant principalement à :

  • garantir leur confidentialité, leur anonymisation et leur protection ;
  • empêcher leur divulgation et leur exploitation à des fins commerciales (promotion de produits ou modification des contrats d’assurances…).

Dans le cadre d’essais cliniques ou de cohortes épidémiologiques, des procédures claires doivent être respectées. Les patients donnent leur consentement et une déclaration doit être faite auprès de la CNIL (Commission Nationale de l’Informatique et Libertés), qui donne droit d’accès et de rectification à l’ensemble des données conservées.

Le problème concerne certaines collectes de données, qui se font à l’insu des contributeurs, comme lors de recherches sur internet par mots clés, via la transmission de données d’objets connectés, ou parce que naïvement certaines personnes livrent de leur plein gré beaucoup d’informations sur internet (dans des forums, sur des applications…). C’est bien là que de nombreux problèmes éthiques se posent et que chaque personne doit s’interroger sur les risques que représentent la captation puis la transmission de ses données personnelles. Comme le dit le professeur André Grimaldi, professeur émérite à la Pitié Salpêtrière à Paris « Quand c’est gratuit, c’est vous le produit ! ».

* Une cohorte épidémiologique permet de suivre dans le temps  un certain nombre de personnes et l’évolution de leur état de santé.

 

EN CONCLUSION

Les objets connectés, même s’ils cristallisent les craintes et nécessitent une mise en garde préalable  des utilisateurs, présentent de nombreux intérêts. Ils sont un appui précieux pour le patient et son personnel soignant, notamment dans le cadre du suivi de pathologies chroniques, où le patient est livré à lui-même au quotidien. La centralisation et les facilités de transmission des données permettent davantage d’anticipation, une meilleure adaptation des traitements et in fine de réduire les risques de complications aiguës et chroniques.

De l’intrusion au contrôle

La collecte de données n’équivaut pas nécessairement à un « flicage » des patients, mais peut et doit être un réel outil de progrès médical et c’est bien ce qu’elle est la plupart du temps. L’accès aux nouvelles technologies est bénéfique au patient, si toutefois on lui donne les clés nécessaires pour comprendre et interpréter ces données. Et c’est bien là un objectif majeur de l’éducation thérapeutique, que de rendre le patient autonome dans la gestion de son traitement. L’avènement de ces nouveaux outils dans les stratégies de soins, et la performance de certains algorithmes utilisés à des fins de diagnostic  de maladies, notamment génétiques, soulèvent la question de la médecine de demain. Sera-t-elle virtuelle ? Des ordinateurs surpuissants remplaceront-ils nos médecins ? On en est encore loin. Car l’humain est bien à la base de la médecine, l’empathie, le lien entre un soignant et son patient, la manière dont un diagnostic est annoncé sont autant de facteurs de succès du traitement qui sera mis en place. Et ça, un ordinateur n’est pas prêt de le reproduire !Enfin, se pose également la question de la qualité et de la source des données, de la rigueur de la saisie… Une quantité de données à opposer à la qualité ? Pas forcément, mais il s’agit de modérer certains résultats et ne pas tomber dans une approche trop standardisée, non contextualisée et basée uniquement sur une vision statistique.

Car chaque être humain est unique.

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